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Hontes

Souffrances, amour, désespoir, moquerie, musique et philosophie... La vie, quoi !

Nécro 2015

Publié le 31 Décembre 2015 par Luc dans Le mur du temps

 

2015 va s’éteindre dans quelques bouffées de chaleur, sous le soleil renaissant.

 

Je m’en réjouis absolument. 2015 fut une année pourrie, comme toutes les autres d’ailleurs.

 

Mes carnets une fois de plus soigneusement tenus m’ont permis de dresser la liste des hommages mais aussi des soulagements liés à certains décès des douze derniers mois, parmi lesquels je ne me compterai donc pas cette année encore. Évidemment, mais c’est la vie, le nombre des réjouissances va s’avérer inférieur à celui des chagrins…

 

  • je commence toujours les nécrologies annuelles par les plus modestes disparitions, celles touchant mon amie de toujours, la télévision française des années 70-80 et un peu 90 : comment ne pas mentionner dans en tête de liste l’hirsute Alain de Greef, l’infatigable défenseur des Guignols et de Groland devant le CSA (aaah grosse influence Dan Rather, décalage, et Mickael Kael ‘cule un mouton !) ? Viennent immédiatement après l’acteur Patrick McNee au flegme so british dans « Chapeaux melon et bottes de cuir », alors même qu’en tant qu’iconoclaste j’ai toujours préféré Purdey-Joanna Lumley à Emma Peel-Diana Rigg). Je n’oublierai pas non plus le compagnon de mes samedis matins juste avant le tennis, durant tant d’années : Michel Lis aka Michel le jardinier, le seul qui ait pu me faire aimer penser que j’aurais pu faire quelque chose en jardinage alors qu’il s’agit probablement du sujet dont je me contrefous le plus… dans mon sport télévisuel cette fois, je citerai Guy Ligier (pour les courses de Jacques Lafitte à la fin des 70ties et début 80ties) et Jean-Luc Sassus, chevelu rapide du PSG de la grande époque.

 

  • des disparitions moins modestes et trop nombreuses cette année dans le monde cinématographique, mon ami de toujours. Un réalisateur : Wes Craven (Les Griffes de la Nuit, Scream) à l’efficacité incroyable au vu du second degré savoureux marquant toutes ses œuvres. Actrices ? Anita Ekberg ou la plus belle scène de fontaine de l’histoire du cinéma N&B ou en couleur ; Corinne Le Poulain, la belle minaudeuse de l’Arsène Lupin de Descrières parti il n’y a pas si longtemps. Encore plus belles, sont parties cette année la sculpturale Laura Antonelli à l’érotisme ultime, au sexe fou, et encore Maureen O’Hara (oaraaah le regard d’amour qu’elle porte sur Quasimodo dans Le Bossu de Notre-Dame…). Les acteurs ont été un poil plus épargnés, mais trois décès méritent d’être évoqués dans notre inventaire mortuaire : Christopher Lee dont le seul patronyme suffit à le définir ainsi qu’à confirmer les conclusions des doctes thèses universitaires considérant que Shakespeare peut se retrouver en tout lieu et de tout temps, et puis Omar Sharif (le plus dostoïevskien des acteurs égyptiens, peut-être en raison de ce goût partagé et immodéré pour le jeu ?). Je terminerai par Leonard Nimoy, classé en tant qu’acteur pour mes souvenirs d’enfance et surtout d’adolescence (M. Spock dans Star trek première époque sur la 5 de Jean-Claude Bourret, nuitamment en fumant des pétards et en buvant de la vodka, c’est incomparable !), mais ce monsieur savait faire mille autres choses (chanteur, réalisateur…).

 

  • 2015 a plutôt épargné les habitants les plus essentiels de mon univers musical ; je citerai à l’hommage de mes rain and tears Demis Roussos, époque Aphrodite’s Child 1968 ! Lemmy Kilmister, le rauque chanteur de Motörhead (je n’ai jamais aimé le hard rock pourtant, mais j’aimais bien Lemmy avec sa grosse voix : « I’m so bad, Baby I don’t care ! », peut-être sa proximité plus punk que heavy metal…). Et surtout John Bradbury, le batteur sautillant des Specials.

 

  • il faut également rendre des hommages particuliers à ceux qui m’ont fait rire, ce qui est de plus en plus rare : à Charb et Cabu donc, Cavanna ayant eu la bonne idée de casser sa pipe juste avant le massacre, à Pascal Brunner aussi (« Rien à cirer » ayant peuplé toute la fin de mes études) ainsi qu’à Laurent Violet (pour une fois qu’un Savoyard au nom de coquillage méridional peut figurer dans ma liste d’aimés !).

 

  • enfin, mes hommages spéciaux à Bernard Maris (écoconomico-rigolo), Tarek Aziz, (le ministre christianococo-rigolo de Saddam), sans jamais oublier (honneur et fidélité) Mile Mrkšić, patriote de l’armée populaire yougoslave qui rejoint dans la tombe nos amis éternels Slobodan Milošević et Željko Ražnatović.

 

 

Allez, cessons-là les pleurs sur ceux qui sont partis, car il m’est impossible de résister à la vile tentation de dresser une brève liste des morts de 2015 qu’on ne regrettera pas, voire dont on se réjouit absolument que l’Être Suprême nous en ait débarrassé définitivement.

 

  • commençons par du politiquement incorrect, l’année 2015 fut bien réussie pour les politicards et divers magouilleurs de la même engeance : François Michelin (le paternaliste exploiteur des pneumatiques éponymes), Francesco Smalto (c’est quand même lui qui a pondu les costards de Claude François !), Bernard Marionnaud (le parfumeur du Front Bleu Marine), Claude Dauphin (PDG de Trafigura, atroce 3ème mondial du courtage pétrolier : une telle franchise dès la raison sociale, ça ne s’invente pas !), Pierre Berger (pas le fan de Saint Laurent, le PDG d’Eiffage, le vice-roi du BTP, mort d’une crise cardiaque assez jeune, comme bien des sportifs cette année : le capitalisme, le sport et le travail en général sont néfastes pour la santé), Licio Gelli (facho, vénérable franc-maçon de la loge P2, proche de Berlusconi : besoin d’autres commentaires sur l’individu, hmm ?). Et le meilleur pour la fin : André Glücksmann est mort, ouuuaaiiiis ! Cors et trompettes, chapeau l’artiste, mais à la réflexion il s’était fait un peu discret ces dernières années, ayant pris conscience de la somme de conneries qu’il avait pu écrire et dire. Si seulement il avait pu emmener B.H.L. pour son dernier voyage vers la Cave des Patriarches…

 

  • musique : réjouissons-nous, camarades citoyens, de la disparition de Guy BéartAh ben j’vais vous chanter une chanson ! Non merci, Guy, ça ira… »).

 

  • dans la rubrique cinéma/télévision, nous nommerons Roger Hanin, qui me pourrit par sa mort une partie de mon prochain roman où il était censé justement se prendre une balle dans la poitrine (j’ai donc dû le remplacer par l’animateur Arthur…) et Dick Van Patten, si, si, rappelez-vous le père affligeant et rondouillard de « Huit, ça suffit », une bonté touchant au débonnaire, une autorité pusillanime et un courage dégoulinants, beuuaarkk…

 

  • à noter cette année le maintien spécial de la catégorie créée l’année dernière, judicieusement intitulée « Autres connards » : en premier lieu, les frères Chérif et Saïd Kouachi ainsi qu’Adama Coulibaly (no comment), puis dans un autre style Florence Arthaud, Alexis Vastine et Camille Muffat, sportifs morts pour la gloire… de la téléréalité ! Je préfère encore le cancer, tiens !

 

Enfin et malheureusement, l’information est une nouvelle fois confirmée : en 2015, le cocaïnomane Johnny Halliday n’a toujours pas cassé sa pipe en toxine botulique.

 

Ni rires ni crachats.

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Faiblesse

Publié le 30 Décembre 2015 par Luc dans Marseille (du 2-4-97 à février 1998)

J’imagine que les liqueurs de napalm aux senteurs subtiles qui jouent à flots longs dans mon estomac vont se calmer, l’apaiser pour me donner enfin à la mort nocturne. Les remugles de ma pusillanimité et de ma faiblesse me reviennent en langoureuses brûlures, et je ne désire plus que m’effacer devant cet ignoble souvenir.

 

Penser que rien ne peut s’être reproché revient à nier l’évidence, mais il faut cependant savoir déceler la coalition abjecte, la bêtise avide et méchante de l’autour de soi, qui ne saurait qu’être hostile.

 

J’éprouve la nette sensation de décliner doucement, sans à-coups ni réaction de nuire, pétrifié par la remembrance de ma faiblesse.

 

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Pingouineau

Publié le 17 Décembre 2015 par Luc dans Les rêves se terminent toujours (9-4-31-7-01)

 

J’ai senti mon regard sombrer dans la chaleur lourde et un bruit de pompe.

 

Apprêté comme pour un départ, le pingouin se délaisse de tout son dos sur son lit de cuisson. Ramenant ses palmes en gisant sur la poitrine, il ferme ses yeux sans paupières et se recueille doucement sur le sort du monde.

 

Il n’est pas bien vaillant, le pingouineau au bonnet rouge. La chaleur lui pèse à mon regard. Ses aisselles moites le gênent quand je compatis avec son désentrain. Comme moi, il regrette sa luxure, son renoncement devant l’odieuse nécessité du voyage qui l’a amené jusqu’ici.

 

Il ne se repent pas moins de l’orgueil qui lui dentelle les palmes tremblantes, quand il ne peut refuser un défi, aussi absurde soit-il...

 

Il se mord la nageoire quand il songe à la somme d'inepties qu’il a pu sortir pour avoir le dessus dans ses conversations de comparses hyperboréens...

 

Mais maintenant, seul dans un pays chaud, la réflexion le rend sans déprendre. Alors il s’allonge sans paix et ses yeux ronds sans paupières cillent sur l’éternité de l’erreur et du mensonge.

 

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Echappatoire

Publié le 14 Décembre 2015 par Luc dans Gisant

 

 

Une forme noire, fine et légère, souplement

S’échappa lorsque j’arrivai sur les lieux clairs.

D’une vrille féline elle bondit de pierre

Blanche en bitume gras, partant innocemment.

 

Se pouvait-il qu’elle ne m’eût pas vu peureux,

Forçant le pas métré sitôt vu son dos maigre ?

Se pouvait-il qu’elle me fuît, lucide et aigre

Sur ma funeste entrée en son antre heureux ?

 

Je suivais sa silhouette sombre depuis tant de mois,

Ourdissant stratagèmes, chausse-trappes et pièges,

Construire la nette rencontre de nos sièges.

 

Cas fortuit, café-crème afin qu’enfin vers moi

Son regard de belette, aux couleurs qui s’agrègent,

Se portât, bleu et blême, d’un amoureux effroi.

 

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Insécurité en Alsace

Publié le 11 Décembre 2015 par Luc dans Ecrivain raté (du 4-1 au 27-8-13)

 

Je roule nuitamment sur l’autoroute en Alsace où j’ai un rendez-vous, suffisamment important pour que le stress m’envahisse, la crainte du retard dans cette contrée parfaitement inconnue de moi. A un moment, je crois avoir raté la sortie qu’il me fallait prendre. Ralentissant et regardant en contrebas de l’autoroute, je me dis que le rendez-vous ne peut être qu’ici. Je décide donc de stopper mon véhicule, de le quitter, franchis la glissière de sécurité avec aisance et commence à courir, en chaussures de ville, vers les lumières de la ville décelée deux minutes auparavant dans le thalweg. Cette solution m’a paru plus rapide et lus simple que de rouler jusqu’à la sortie suivante, puis de faire demi-tour.

 

Les chemins nocturnes de la campagne alsacienne s’avèrent très vallonnés et sinueux. Si je cours sans m’essouffler sous la pâle lueur de la lune, je n’ai pas pour autant l’impression de progresser vers mon but. Bien au contraire, il me semble que les méandres des chemins m’emportent plutôt du mauvais côté de l’autoroute. Au bout de dix minutes à peine, je prends la décision de rebrousser chemin et de revenir à la voiture.

 

Ci-fait, je redémarre le moteur et reprends ma route avec le pied lourd et prends la sortie suivante, distante de quelques kilomètres seulement de l’endroit où je m’étais arrêté. Je finis par parvenir en centre-ville. A la lumière jaune et vacillante du plafonnier, je tente de déchiffrer les inscriptions du post-it sur lequel doivent être écrites les coordonnées de mon rendez-vous. Si je lis bien « ERNWEIN » pour le nom, l’adresse quant à elle ressemble à un pâté de pattes de mouches. Je m’agace et commence à transpirer abondamment.

 

Descendant une avenue pentue et malgré l’heure tardive, à l’occasion d’une division en deux rues, j’observe la présence de deux hommes travaillant sur un étal de je ne sais quelle spécialité locale, surélevé par rapport au trottoir. J’arrête la voiture moteur tournant et en descends pour interpeller l’un des deux, un moustachu à la calvitie prononcée, qui a l’air sympathique. Je lui demande s’il connaît ce monsieur Ernwein et dans l’affirmative, où je pourrais le trouver. Tout en essuyant un broc de grès, l’intéressé me répond avec un fort accent, de telle sorte que je ne comprends goutte à ce qu’il m’a raconté. Ses yeux pétillent de malice sur ses moustaches frémissantes, mais la lueur cesse soudain et d’un coup de menton, il me désigne une direction se situant derrière moi.

 

Je me retourne brusquement et constate que ma voiture a disparu. Je gueule :

 

- Et merde ! -

 

… et trotte quelques mètres en remontant l’avenue. Sur ma gauche, juste avant la division en deux rues se trouve un petit parking, et je vois une ombre se débiner derrière une voiture rouge à mon arrivée. Je m’engage et vois un autre homme, en train de calmement fermer ma voiture avec ma propre clé. Je gueule derechef :

 

- Attends, tu vas voir, petit enculé ! -

 

… en m’approchant vivement de lui, qui ne perd pas son flegme. Petit ? Pas vraiment, cet Arabe me domine d’une bonne tête et paraît bien plus costaud que moi, vers qui il se dirige sans hâte d’un air décidé, avec sa trogne grêlée. Je m’inquiète soudain lorsqu’il prononce les mots suivants :

 

- Mais qu’est-ce que tu vas faire ? On est tous là. -

 

… tandis que des ombres surgissent de derrière les voitures garées sur le parking. Je comprends que je n’ai aucune chance, déjà que je n’en avais guère, semble-t-il, lorsqu’il était seul. En un mot, outre de me faire dérober ma voiture, je vais prendre une bonne raclée, dans le meilleur des cas. N’écoutant que ma lâcheté légendaire mais manipulatrice, je décide de modifier mon discours envers le voleur :

 

- OK, OK, pas de souci : puis-je simplement reprendre mes papiers ? -

 

… tout en songeant que mes papiers se trouvent dans mon cartable, où se trouvent bien imprudemment tous mes codes bancaires, un tas de factures, mon passeport, mes œuvres, ma vie quoi ! Je m’imagine prendre mon cartable de cuir noir de volée, par le siège passager et échauffé comme je le suis, courir de toutes les ailes de ma peur, irrattrapable car dératé par mon angoisse morbide, comme un voleur de génie.

 

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Chômage

Publié le 8 Décembre 2015 par Luc dans Marseille (du 2-4-97 à février 1998)

 

Comment avouer que cette vie d’inaction, d’oisiveté devrais-je dire, me convient à la perfection ?

 

Commettre des haïkus sans y penser, une apologie de l’immobilisme, serait un avenir bienheureux.

 

Mais ce soir, il est une tristesse difficile à tromper par l’image des jours à venir. Je demeure allongé sur le lit, le cœur battant à tout rompre et la gorge prise en étau, subissant on ne sait quelle malédiction que la culpabilité accentue encore.

 

Maintenant, je vais me délaisser dans les affres de l’inconscient et du sommeil, rêvant de ne pas trop cauchemarder.

 

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Vow

Publié le 7 Décembre 2015 par Luc dans A la recherche de L (du 6-11-02 au 30-1-03)

 

 

De ces journées sombres précédant les parades intempestives, aux lucioles boursouflées des fêtes de fin d'année... Comme habituellement, il ne sera pas question ici de chalet douillettement recouvert d'un manteau neigeux, quelques bouffées de fumée s'échappant de la cheminée de briques masquant à peine le ciel immaculé, les étoiles glacées par millions... Pas plus que de rennes chantant le gospel, d'étrennes éreintées à force d'être convenues, de reine de la nuit ni de jardinet (cela n'ayant strictement rien à voir)...

Simplement (enfin, si j'ose le terme), entrant dans ma Xième année, je me disais, pourquoi pas pour une fois, qu'éventuellement adveniat regnum meum, fiat voluntas mea, sicut in caelo, et in terra (etc.). Que cette damnée raison ne vienne plus tempérer les crises mystiques et mégalomanes...

Les vœux pieux n'engagent à rien de toute façon... L'inspiration se fait lourde et sans teneur quand plutôt que de descendre par le baiser délicat d'une muse volage, elle s'extirpera difficilement du terrible combat pour l'espace vital qui opposera foie, entrailles et estomac, la bouche luisante des abus encore proches se contentant de psalmodier de bonnes choses à tous, avec l'utilité dans le ton.

Vous l'aurez deviné : lorsque le soleil ne pointe pas derrière les Alpilles, de la fenêtre de mon bureau de sous-secrétaire d'Etat aux anciens combattants de la guerre de 1870, l'esprit, écartelé entre son apparence oublieuse ou égoïste et sa nature profondément amoureuse, a plutôt tendance à aller qu'à venir, à vagabonder parmi nos souvenirs communs, et imaginer l'avenir aussi indispensable avec vous que ce passé.

 

A vous tous.

 

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Pas de fuite(s)

Publié le 4 Décembre 2015 par Luc dans Gisant

 

Des images d’une nudité parfaite dans la pénombre me reviennent tandis que les cris, les pleurs, la pression sanguine, les mâchoires, les muscles, les sons et le ciel se pressent en moi. Je ne comprends rien aux affaires de ce monde, veux m’en désintéresser jusqu’à l’éther. Peut-être cette vision d’un visage parfait surmontant une poitrine parfaite, sans qu’il soit besoin de s’appesantir trop bas, constituait-elle une volonté d’évasion, une rêverie moqueuse des contraintes de la réalité. Mon empyrée tamisé. Ma sauvegarde des mauvais jours. Mon salut éternel.

 

Rien de tout cela : cette nudité se voulant aguicheuse était dénuée de tout érotisme, et mon esprit malingre entama son travail de destruction alors que les bruyants assauts de l’extérieur hostile coulaient sur ma peau trop chaude. Je contestai formellement la beauté de ma vision : malgré sa jeunesse, je décelai bientôt les premières velléités d’enrobement abdominal, la fesse menaçant goutte d’huile, l’ischio-jambier un peu flasque. Cette jeune courtisane imaginée tombait de mon piédestal sans teneur, d’une lascive luxure amour ne saurait naître.

 

Alors, même en tentant désespérément d’oublier son corps au profit de la fuite de son beau visage coupé en deux entre la vanité charnelle de son étendue et sa volonté de dissimuler sa faiblesse, de ses beaux yeux trop maquillés qui ne pouvaient plus verser de larmes tellement son sort était irréversible, la promettait à la lèpre d’une corruption progressive, la réalité reprit goût à mes sens désolés. Aux cris et pleurs de me faire exploser. A la pression sanguine, aux mâchoires et muscles de m’oppresser. Aux sons et au Ciel de me faire cesser.

 

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Moineau

Publié le 3 Décembre 2015 par Luc dans E trouz an amzer (du 1-8 au 15-11-03)

 

Il m’a fallu tout d'abord à m'insurger avec force, le poing droit serré pour marquer la force de mon propos mais tout en veillant à ne pas renverser la coupe de champagne que je tenais délicatement dans ma main gauche, contre l'accusation indigne portée à mon égard, selon laquelle, lors des déjeuners et cocktails, je pérorerais.

 

Emphase, prétention, c'est à n'y rien comprendre... Comment se représenter l'être odieux et abject (dont j'ai observé par ailleurs que l'attention portée à son discours boursouflé lors desdits déjeuners s'avérait tout sauf soutenue et captivée...) que je suis censé être, et dans le même temps la piètre tentative de mes congénères de s'inviter dans ma caverne ou de me convier à leurs sauteries ?

 

Lorsque la provocation le cède à la prévarication, il n'est rien qui puisse me sauver, d'où peut-être le calme qu'envisageait une amie dans sa communication, et que je considérerais plutôt comme sérénité, celle qui précède l'inéluctable arrivée de l'hiver, lequel enroulera langoureusement ses bras froids autour de la frêle et tremblante échine du moineau immobile.

 

Une nouvelle naissance aura quand même lieu, mais la gouaille moqueuse dont je suis l’objet, de petit et insolent Gavroche au tir trop précis, se mélange dans mon esprit confus à l'absurdité douloureuse de l'amour tel que se le représentent ces jeunes filles, sans plus de force ni d'envol que le moineau dans sa gangue glacée, l'œil pétrifié sur le monde.

 

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