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Hontes

Souffrances, amour, désespoir, moquerie, musique et philosophie... La vie, quoi !

R149 L'attaque du château de Kerguehennec

Publié le 29 Janvier 2016 par Luc dans Le mur du temps

 

Réfugiés au domaine de Kerguéhennec, près de Bignan, entre Plumelec et Locminé, nous nous attendions à un assaut des milices hostiles. Le soleil se levait à peine et je revenais de patrouille quand du parc arboré voisin des tirs emplirent l’air. Avec deux camarades nous nous repliâmes rapidement vers l’aile droite du château pour nous protéger derrière l’avancée du bâtiment principal. Ca défouraillait de tous les côtés et nous étions déjà à court de munitions. Je reposai mon FM en bandoulière et pénétrai dans le corps de garde où je trouvais une sorte de fusil à pompe d’un modèle inconnu, idée hétérodoxe d’un ingénieur breton un peu fou à partir d’un Benelli M3. L’arme noire devait faire un mètre quatre-vingts de long et m’obligea à m’étirer pour actionner le résistant garde-main. Je ressortis du bâtiment en gueulant et vis un groupe de trois ennemis sur la terrasse, se protégeant de tirs alliés derrière une grande vasque de granit au-dessus de laquelle était agité par le vent un gros ballon gonflable, vestige de la dernière fête au Domaine. Je tirai au jugé sur le groupe d’assaillants, mais fus surpris par l’imposant recul de mon arme. Trop haut : mon shrapnel traversa le ballon rouge, qui ne creva pourtant pas. Des coulées violacées d’un liquide visqueux s’écoulèrent de ses blessures tandis que les trois Arabes, terrifiés, battaient en retraite au-delà de l’aile gauche du Domaine, derrière une butte. Des sept cartouches de 12,7 qui graillaient encore mon chargement tubulaire, j’arrosai le promontoire, sans succès.

 

Je retournai dans le bâtiment pour trouver des munitions pour mon FM, qui était plus efficace à distance. Rien à faire, rien dans l’armurerie, aucun des autres partisans ne disposant de suffisamment de chargeurs pour me dépanner. Ouvrant fébrilement tous les tiroirs de la salle d’armes, je tombai sur un petit FM argenté ressemblant à un M16 nain, avec des chargeurs vides et de nombreuses munitions. Étonnant mais mieux que rien. Je m’appliquai fébrilement à grailler les chargeurs, mais quelque chose coinçait. Je me résolus à en démonter un, et à la place du ou des ressorts, je constatai la présence de rails distincts émaillés de dizaines de fines petites pièces métalliques, donnant de l’ensemble une image proche de celle d’une recharge d’agrafes partie en plusieurs morceaux car mal disposée dans le rail de l’agrafeuse. Rien à faire avec ce truc manifestement pas au point, pas de temps à perdre à tenter de le réparer ou à tout le moins comprendre comment il marche.

 

Je ressortis et rejoignis les camarades tandis que les balles sifflaient encore, dans les nuages de poussière, comme le merle sur sa haie.

 

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R24 Décapitation

Publié le 27 Janvier 2016 par Luc dans Engagement (du 8-4 au 28-12-04)

 

Le chat est malade. Il souffre et sa douleur doit être abrégée dans un geste étrangement qualifié d’humanité. Je saisis le pauvre animal par les aisselles et sa face terrifiée vient devant mes yeux. Son poil roux et blanc est gras et mat, témoigne de sa santé précaire.

Je ressens son corps tremblant sous mes mains fermes, alors que ses yeux verts me fixent avec désespoir.

J’ignore encore comment je vais en terminer. Je veux choisir la méthode qualifiée encore une fois curieusement de plus humaine. Le coup du lapin me paraît la meilleure solution, mais pas question de faire un double Nelson à un chat… Alors je tourne sur moi-même et me dirige vers la table de chêne. Repoussant mon désir de l’embrasser une dernière fois afin d’éviter le baiser de Judas, je serre mes mains plus fortement, entourant son thorax. Je prends mon élan, soulève l’animal et abats lourdement sa nuque sur le rebord de la table massive. Je crois avoir manqué de force dans le coup porté, mais je vois ses pupilles se dilater brusquement, à en recouvrir tout l’iris, juste avant que sa tête retombe et que les yeux se closent enfin, la lumière éteinte. Le corps inerte dans les mains et le dégoût de ce que je viens de faire, je laisse tomber la dépouille sur le sol et me prépare au deuil.

 

A peine le temps de me retourner encore que je constate que le cadavre a tressailli. Les paupières se rouvrent. Le chat secoue la tête de droite et de gauche, s’ébroue comme un assommé se réveillant. Il est donc vivant.

 

Sed non decet. Il devrait être mort.

 

La suite est confuse. Je crois lui avoir coupé la tête avec un instrument non coupant… mais mon âme refuse la violence. Mon souvenir aussi.

 

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Chômage et sexualité

Publié le 26 Janvier 2016 par Luc dans Marseille (du 2-4-97 à février 1998)

 

Quelle peine de le dire : le sexe m’ennuie prodigieusement.

 

Dans la répétition machinale et bestiale d’un va-et-vient purement inné, il ne fait que me rappeler le travail. Je croise parfois, au cours de la vie morne, quelques scènes de copulation. Au-delà du légitime émoi physique qui s’empare du bas de ma personne durant un instant, c’est surtout le dégoût qui prend le dessus sitôt que la réflexion met au pas la réaction. D’ailleurs, je ne ressens même plus la douleur ou le plaisir (… « même pas mal »…), dans une sorte d’instance de déshumanisation.

 

Je vais couler comme une larve sans avoir l’espoir de subir la mutation en chrysalide. En regardant Derrick et Côte Ouest, je tisse mon cocon de déjections. Le chômage a fini par m’apprendre le tissage.

 

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De Profundis

Publié le 25 Janvier 2016 par Luc dans Vivre... par dépit (du 24-6 au 20-9-96)

 

En tournant le regard vers le ciel immaculé,

Que je ressentais baigné de soleil,

Le vertige frappa, ainsi que le firent les dents

Acérées du froid sur mes mains et mon gastre.

En tournant le regard vers le ciel rouge,

C'est la tête qui a tourné,

Et le corps chute lourdement sur les reins,

Puis les épaules.

 

Alors, allongé et de nouveau

Le regard plongé dans le ciel,

Il n'a pas à orienter les yeux cette fois.

Il peut déguster le met dans toute sa saveur,

Ne négligeant aucun arôme.

Du ciel se scindent les odeurs

De cannelle, de poivre et de piment,

Puis celles plus douces et sucrées

De coton, de hêtre et de charme.

 

Aux vapeurs se mélangent

Les effluves de la terre humide,

L'humus âcre d'une pluie finie.

Alors, dans la ribambelle

Des senteurs et des étreintes,

Le ciel devient plus rouge,

Et il attend que quelqu'un ferme ses paupières.

 

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Le clou de la soirée

Publié le 19 Janvier 2016 par Luc dans Gisant

 

J’arrivai à la tombée du jour dans ce quartier périurbain où se trouvait ma demeure. Sous le ciel s’obscurcissant, je vis David D. se bagarrer non loin de mon pare-brise avec le portail de notre cour, fait d’un filet de volley, rendu totalement incontrôlable en raison du grand vent qui mugissait ce soir-là, balayant notre cour et l’espace omnisports voisin, au même gris de goudron. Garant ma voiture sur une place libre, j’en descendis et me précipitai pour l’aider. Malgré les gifles de polymère, à deux nous arrivâmes à enrouler le portail filet sur son poteau, que nous descellâmes pour le remplacer sans un mot par le portail en métal blanc et pointé de rouille de l’espace omnisports. Le poteau entra parfaitement dans son empreinte au sol ; la porte pivota en grinçant tandis que je la poussais jusqu’à ce que je l’entendisse la clenche verrouiller l’ensemble solidement. Pour l’entrée dans notre cour, cela se révélerait compliqué à l’usage, mais le tout paraissait plus solide.

 

Saluant David, j’entrai enfin dans ma maison. J’étais crevé de ces efforts, saoulé par le vent qui piquait mes yeux rougis. Dans le salon richement apprêté relevai-je après coup, je tombai nez-à-nez avec une pas tout à fait inconnue. J’avais déjà vu cette jeune femme mais me trouvais incapable de me souvenir de son prénom, à cette brune de taille moyenne, au physique juif et avec de très jolies dents. Je l’embrassai par politesse sur le mode impersonnel et me dirigeai en miment des excuses vers la salle de bain en vue de m’y changer. Passant l’huis de la porte, la situation ne me laissait guère de doutes : David, une presque inconnue, le nombre de plats, d’assiettes et de verres sur la grande table du salon, des bougies aussi… Quelque chose se passait ou allait se passer chez moi.

 

Je commençai par déboutonner mon pantalon pour dégager l’outre d’anxiété qui me tenait lieu d’hypogastre quand une autre fille en tenue de soirée pénétra dans la salle de bain. Je dis d’une voix agacée : « C’est occupé ! ». Elle mit la main devant sa bouche en pouffant. « Dehors ! Heraus ! ». Elle sourit de toutes ses dents blanches et régulières puis referma la porte. Je me jetai sur elle… tentant de la verrouiller pour être enfin tranquille. La clenche du verrou était située bizarrement dans le mur soutenant la porte. J’en ouvris la petite trappe, et constatai que le mécanisme du verrou était bloqué par plusieurs petits papiers blancs recouverts de traits de feutres multicolores d’un effet très festif mais complètement aberrant à cet endroit précis. J’en étais à mes lamentations de fermeture quand un clone des deux précédentes fit intrusion dans la salle de bain, une coupe de champagne à la main. Je gueulai : « Putain, mais c’est pas vrai ! C’est une malédiction, cette soirée ! RAAAUUUS ! ».

 

Erubescent, je revins dans le salon sans m’être changé, après avoir presque bousculée l’invitée, et je vis A., blonde magnifique en robe de soirée, l’air grave et préoccupé, accoudée sur un guéridon orné de coussinets de cuir noir, un verre de vin blanc à la main. Je lui posai tout de go la question du lieu de cette sauterie embryonnaire d’inattendu, ce n’était pas mon anniversaire que je susse, alors qu’est-ce qui justifiait la surprise ? Elle baissa les yeux, accablée par mon absence complète d’implication dans la réjouissance voulue globale et la fête en général.

 

Mon regard distingua alors de plus en plus de gens connus, profitant de la douceur de la cour, tandis que la pluie commençait à battre le bitume dans la lueur orangée des réverbères. Les invités riaient pourtant ; certains s’abritaient comme ils pouvaient le long des hauts grillages verts du terrain omnisports. Quant à moi, mal rasé vespéral et honteux de tout désormais, je scrutai certains de mes clients, présents, bien habillés et aux grosses bagnoles, Céline V., dont j’imaginais que le Lionel de mari, riche et puissant, ne pouvait être bien loin. Si fait. Il discutait là, un verre de whisky à la main droite, d’un air décidé comme à son habitude. Il y en avait donc même qui étaient venus de Lyon ! Pour moi ? Ce vieillard fatigué ? Quelle gageure !

 

J’étais confondu, terni, en paresse réjouie. Comment A. avait-elle fait pour rameuter tout ce beau monde ? Et pourquoi pas mon chef Y., tant que l’on y était ?! Je ne comprenais pas pourquoi elle avait pu penser que j’aimerais être le clou d’une telle soirée. Ma respiration se fit courte ; mon cœur s’accéléra et mon regard se noya dans la pluie orange et les rires entrecoupés de conversations trop sérieuses.

 

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No future, no children

Publié le 11 Janvier 2016 par Luc dans Murs gris - ciel blanc (du 23-9 au 23-12-96)

 

Une connaissance vient d'avoir une petite fille, Claire, cadette de trois ans de son frère Adrien.

Je lui écrivais avec ironie qu'il venait de faire un joli pied-de-nez à Malthus. Il n'a pas pensé que j'aurais voulu inscrire sur la carte dégoulinant de rose espérant, qu'en ces jours où les nuages s'amoncellent, il est peut-être autre chose à faire que des gamins.

Quelle monstruosité d'égoïsme que d'infliger la vie à cette nature simple, en ces circonstances. Egoïsme ou inconscience, je l'ignore après tout.

Je réécoute de plus en plus les textes fondateurs de Johnny Rotten :

 

Pas d'avenir pour vous, pas d’avenir pour moi.

 

Et dire qu'il hurlait ceci il y a vingt ans !

 

L'illogique de la contestation me frappe durement, quand je ne sais à quoi me rattacher. Il y aurait bien Jean-Pierre Chevènement, mais décidément, il fait trop froid au sein du Territoire de Belfort...

Je reviens quand même sur la carte rose, toute empreinte de félicitations inattentives, que la tradition a dictées plutôt qu'un réel assentiment. L'un égrène ses phrases impersonnelles, que les autres s'empressent de soussigner, trop heureux de ne pas avoir à faire l'effort de composition, de rédaction, ce qui revient à n'être qu'hypocrite au lieu de menteur... J'ai mis un mot, dont l'effet plaisant masque le pessimisme profond.

Puisse-t-il n'y comprendre goutte...

 

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CHARLIE HEBDO, un an après

Publié le 8 Janvier 2016 par Luc

Ndla : à l'occasion de cet anniversaire joyeux, je vous livre mes premières réflexions de l'année dernière. Je n'en changerai pas une virgule !

 

DES VOIX DISCORDANTES DANS LE CONCERT D'HOMMAGES A CHARLIE

 

Cabu, 76 ans ; Wolinski, 80 ans ; Tignous, 57 ans ; Honoré, 73 ans ; Bernard Maris, 68 ans ; Elsa Cayat, 55 ans ; Mustapha Ourrad, 60 ans et des brouettes ; Michel Renaud, 69 ans.

 

PIERRE GATTAZ SE FELICITE DU CARACTERE « EXEMPLAIRE QUOIQU'UN TANTINET RADICAL » DE LA GESTION DES COLLABORATEURS SENIORS DANS CETTE P.M.E FRANCAISE.

 

EMMANUEL MACRON AJOUTE : « NOUS NE DEVONS PAS A PRIORI REFUSER DE REFLECHIR SUR LES IDEES DE DAESH ET D'AL QAIDA EN MATIERE DE REFORME DES RETRAITES ».

 

Voilà voilà, moi je n'ai pas affiché le « Je suis Charlie », ni sur mon profil Facebook, ni sur la vitre de mon bureau, ni moins encore sur la porte de mon domicile, parce qu'entre nous, je n'étais pas, ou plus exactement plus totalement Charlie.

Val avait dans les nineties transformé ce journal anar en pastèque, vert écolo à l’extérieur et rouge gaucho à l’intérieur pour filer la métaphore frontiste, ou mettons « ultra des Lumières » dans une approche plus philosophique, mais de toute façon pas noir comme l'anarchie.

J'avais donc plutôt suivi les pérégrinations de Chauron (dans Zoo notamment entre 1998 et 2000), puis Siné (aidez aussi Siné Mensuel, chers camarades, filez-lui plein de pognon tant qu’il n’est pas crevé, après ce sera trop tard !), ces deux-là me semblant plus dans la ligne historique de Charlie et de l'Écho des Savanes que les autres. J'aimais bien Charb toutefois, lui qui donnait avant du « mon oncle » à Siné... autres temps, autres mœurs.

 

De toute façon, comme le disait Michel Onfray dès le lendemain de l’agression, la compassion (un peu compassée d'ailleurs, de millions de personnes n'ayant jamais lu et soutenu la presse anarchiste, qui étaient aussi convaincues voici peu que Coupat, alias le caténairicide, était l'ennemi public n° 1...) devra bientôt céder le pas à la réflexion politique, l'analyse politique de ce qui se produit.

 

Il convient de souligner de prime abord que se fondant sur un seul livre mais faute de dogme structuré par une église (moi je m'en moque un peu, ne croyant qu'en les anciens Dieux !), l'Islam (tout comme le protestantisme et ses sectes abstruses, sans oublier le judaïsme soit dit-en passant) comporte en elle-même des possibilités d'interprétations complètement divergentes (violence/amour, tolérance de type Al Andalus ou au contraire Djihad, etc… le tout grâce à des sourates contradictoires donnant lieu à des hadith eux-mêmes asymétriques).

 

Enfin et surtout, toutes les religions du livre induisent la soumission (ce qui est la signification du mot Islam) : or la soumission est intolérable, à quelque autorité spirituelle ou temporelle que ce soit.

 

Tout le monde ne peut pas être Charlie, et notamment pas ceux qui applaudissent les flics, mettent des kipas, font sonner les cloches ou se prosternent dans une position propice aux coups de pompe au cul. Tout le monde ne peut pas être Charlie, et notamment pas les loups de Wall Street en incrustation géante sur le temple à détruire, et pas les bourgeois et autres beaufs larmoyants, confrontés à l’insondable de l’horreur, de la mort, sans cependant en avoir la moindre capacité de représentation… Cela me fait marrer : nous sommes dans notre immense majorité timorés et lâches, égoïstes et opportunistes, velléitaires. Mais sujets à la sensiblerie... à laquelle nous nous soumettons sans vergogne dans une fugace parodie d’unité pacifique.

 

Walter Ulbricht disait que le bien-être ne se trouve que dans le combat. Nietzsche ne disait guère autre chose dans son Zarathoustra lorsqu’il s’agissait de devenir celui que nous avions toujours été. Charlie ne dessinait pas autre chose, comme Siné et d’autres. Robespierre et Saint Just itou (mais je n’irai pas jusqu’à poser que « La République est un combat », ça me ferait trop mal de citer du Ségolène Royal). Cela étant, le combat est notre seul espoir de Walhalla.

 

Ni larmes, ni crachats : Charlie à jamais insoumis. La République à jamais insoumise.

 

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L'après-coup

Publié le 6 Janvier 2016 par Luc dans Ecrivain raté (du 4-1 au 27-8-13)

 

Mon squelette rapetissait. Il tirait si fort sur mes muscles et tendons et opprimait tous les organes internes. J’avais la nette sensation qu’il ne cesserait sa régression que lorsque je ne serais plus qu’un point de masse maximale qui finirait par imploser dans une bulle de latex bleu, un son ridicule de type « blop », avant que de disparaître en laissant échapper quelques microbulles transparentes à la teinte bleu-pâle.

 

Loin de la fin pourtant, je ne cessais d’endurer les périodes de panique qui succédaient nécessairement à celles, paisibles, de loisir et de cerveau vide. Je n’étais pas fait pour la douleur, je ne fus jamais conçu pour la douleur… ni pour le plaisir d’ailleurs. Je suis un interstice, un entre-deux hors du temps, qui vient bondir dans l’après-coup seulement, avec toute la difficulté de représentation que cela peut supposer.

 

Hier, j’ai appris que j’allais mourir… enfin… non que je n’étais pas au courant, ayant depuis longtemps abandonné le sophisme qu’était d’affirmer que tant que l’on ne m’avait pas prouvé que je pouvais mourir, je demeurais immortel, mais de manière plus benoîte, un bête rapport médical. Ce que je déteste le plus et ne fréquente pour ainsi dire jamais. Une découverte inopinée ou une dangereuse rencontre au sens de Jünger, quelle fatalité…

 

Mais alors d’où vient le fait qu’apprenant la proximité de ce que je redoutais le plus, à savoir la mort, la séparation d’avec mon épouse et mes enfants, l’angoisse semble-t-elle avoir disparu de mon corps et que dans l’effort mon squelette paraît retrouver sa place ?

 

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Lettre à celle qui allait devenir mon épouse

Publié le 5 Janvier 2016 par Luc dans Frais et dispos (du 5-7 au 28-10-02)

 

Ne vois-tu pas venir le neuf sur l’échelle démesurée du moral quotidien ?

 

Devant le silence renouvelé malgré nos paroles estivales, comment te dire que tu restes toujours pour moi une irreprésentable aporie ? Il est en effet terrible de devoir concilier cette sensation certaine de joie de te revoir qui efface toute trace du temps qui s’est écoulé depuis la dernière rencontre, dès lors aussi proche que la veille, et l’attente incompréhensible lorsqu’on la vit présentement, entre ces deux rencontres.

 

La succession apparemment infinie de ces deux états conduit sans doute à l’aporie pour notre côté rationnel, et dans le domaine émotionnel à la désastreuse conclusion de l’absence d’un besoin irrépressible de fréquentes rencontres… au moins pour ta part semble-t-il…

 

Avant de te demander si tu as bien lu le problème XXX d’Aristote (autrement intitulé « L’homme de génie et la mélancolie ») et le fameux opuscule « Le couple » (dont j’aimerais vraiment bien savoir ce que tu en as pensé !), je voulais simplement te donner un signe de vie et partager avec celle qui en est l’objet le regret de ces mimiques amusées, ces réflexions pas si inadaptables que cela, ces envolées avec ou sans teneur, ou autres bouffées délirantes qui donnent une sensation réelle de vie à celui qui s’en trouve être l’ébahi spectateur : je suis définitivement un sectateur d’Anne B.

 

Au fait, as-tu lu le problème XXX d’Aristote (autrement intitulé « L’homme de génie et la mélancolie ») et le fameux opuscule « Le couple » (dont j’aimerais vraiment bien savoir ce que tu en as pensé !) ?

 

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Mes voeux : un pied vers 2016

Publié le 4 Janvier 2016 par Luc dans Nevezintoù

 

Ce matin, encore à moitié ensommeillé malgré mes vigoureux exercices matinaux, mon cerveau a bogué. A un point tel que j’aurais amplement mérité ma place dans « Lundi Ballon », la chronique du Petit Journal réservée aux bons mots des entraîneurs de Ligue 1 durant leurs conférences de presse du week-end footballistique… si l’on n’avait été un jeudi.

 

A Anne au moral faiblard j’administrais ma potion positiviste, volontariste et fataliste à la fois, dans la gloire de la religion de nos ancêtres pour qui le bien-être ne pouvait se trouver que dans le combat, dans les collines et les vallées, à la campagne comme à la cité, sur terre comme sur mer.

 

A ce moment, entraîné sûrement par l’océan dont je venais de parler, franchit mes lèvres l’expression « on est sur le pont de guerre ».

 

 

C’est joli comme expression, elle est parlante, on voit bien le bateau corsaire prêt à aborder un Godon… Joli mais totalement irrégulier. Et pis encore, les symptômes matinaux persistent jusqu’à cette mi-journée : je dois avouer que ce n’est guère le pont quand vient à pied qui sait attendre, vêtu d’un simple pont de poule. Comme Maurice Papied ? Non, ce serait une noyade. Ou Jérémy Pont ? Ah non, ce serait un retour vers Lundi Ballon ! Bref je suis tourneboulé et demeure en pont de grue, ce qui n’a rien à voir avec Bouygues ou Eiffage.

 

Je panique. J’angoisse. Dois-je appeler les pied-ponts ? Non, calmons-nous, le verlan ne me sera d’aucun secours, je le pressens ; je dois couper les pieds avec la peur, et dans ces cas là, comme d’habitude, seuls le verre à pont et la poésie me sauveront. Les mains dans les mains, restons face à face tandis que sous nos ponts, le pied de nos bras passe… Hmm… Apollinaire ça ne le fait décidément pas.

 

Essayons Prévert peut-être ? Beaucoup d'eau a passé sous les pieds et puis aussi énormément de sang, mais aux ponts de l'amour.

 

C’est mieux déjà… Je ne suis pas guéri de mon trouble dyslexique, mais ce sera mon unique souhait, mon pied vers 2016 : les ponts de l’amour.

 

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