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Hontes

Souffrances, amour, désespoir, moquerie, musique et philosophie... La vie, quoi !

NECRO 2019

Publié le 9 Janvier 2020 par Luc

2019 s’est éteinte et je m’en réjouis absolument, comme j’exulte de mes rêves, qui donnent à mes membres inférieurs endoloris au premier froid humide une vitesse surprenante lorsqu’il s’agit de se précipiter afin d’accélérer le moment où je me retrouverai à mon tour dans la nécrologie de l’année en cours.

 

Cette année encore, le nombre des décès réjouissants fut très inférieur à celui des chagrins, ce doit être mon pas du tout porté à la haine (même si on m’a dit que cela tuait le désir, mais c’est un autre problème, ou alors je rajoute le désir dans ma nécro de 2020, à voir…).

 

-        je commence toujours les nécrologies annuelles par les plus modestes disparitions, celles touchant mon amie de toujours, la télévision des années 70-80, dont l’ensemble des rares représentants survivants pourra singulièrement être confondu avec un meeting de Benoît Hamon. En 2019, pour la France, nous a quittés André Gaillard, le dernier survivant des Frères Ennemis après la toujours étrange et irrésolue disparition de Teddy Vrignault en 1984 qui avait sonné le glas du duo déjà obsolète mais toujours très drôle. L’hécatombe vient d’outre-Atlantique, horrible : Denise DuBarry (rappelez-vous bon sang, l’infirmière Samantha Greene dans le feuilleton « Les têtes brûlées » !!!) et Ken Kercheval, l’ignoble Cliff Barnes à la tête de Gargouille, le Flairsou de la série Dallas, ont cassé leur pipe, et la synthèse de cette fin d’époque est marquée par le décès de Leonard Goldberg qui avec son compère Aaron Spelling produisait Drôles de dames ainsi que Starsky et Hutch. Une boucle paraît tellement bien bouclée qu’elle en serre le coup de la rubrique nécrologique « TV des 70ties et 80ties », dont il n’est pas sûr qu’elle passe 2020…

 

-        des disparitions moins modestes et trop nombreuses cette année dans le monde cinématographique, mon ami de toujours. Un réalisateur majeur, Jean-Pierre Mocky, qui fait du cinéma exactement comme moi des bouquins : dans l’urgence, le bordel, l’insouciance du qu’en dira-t-on, bref tout pareil anar de droite, à une différence près sûrement, le talent. Trop d’acteurs tant aimés sont partis en 2019, dont je n’ai pas le droit de taire les noms désormais sacrés : Bruno Ganz (dans Nosferatu de Herzog, Les Ailes du Désir de Wenders, ou encore (mieux ?) dans Der Untergang de Hirschbiegel, quel magnifique acteur !) ; et que dire de Jean-Pierre Marielle, de l’invraisemblable cabot phallocrate et érotomane du cul des « Galettes de Pont-Aven » à la majesté janséniste de « Tous les matins du Monde », en passant par l’emportement, la mauvaise foi au service de la bonne cause dans « La controverse de Valladolid », pour ne citer que ces trois films là tellement l’homme avait du génie. Evidemment, ces noms pourraient faire oublier celui de Charles Gérard, le non-acteur de Lelouch, gros pif, œil inexpressif dont il savait jouer en virtuose des seconds rôles à la française, un autre genre en voie de disparition. Rutger Hauer, il était vachement bien aussi, dans le genre jeu « minéral » de cette gueule blonde taillée à la serpe (Blade Runner, Sin City). Une actrice rejoint mon panthéon en 2019, et une fois encore pas des plus moches (OK les féminazies, j’attends les verges…), Bibi Andersson (la beauté ultime et railleuse dans « Le 7ème sceau » de Bergman) ;

 

-        dans mon univers musical, les années paires sont généralement lourdes. 2019 étant impaire, on aurait pu s’attendre à un peu de clémence de la part de l’Être Suprême, cela aura presque été le cas, sauf pour la Bretagne… Quelques grands noms nous quittent : Roky Erikson (le chanteur fou sous LSD des 13th Floor Elevators et leur instrument phare, la fameuse cruche à glouglou) ; Marcel Azzola (rappelez-vous ce solo d’accordéon de fou où Brel lâchait « Chauffe Marcel, chauffe ! » sur Vesoul)… mais aussi Yann-Fañch Kemener (autrement connu sous Jean-François Quemeneur), le maître incontesté de la gwerz et Claude Besson (« Kenavo prizon Paris » et « Kerouze » !). Plus anecdotique mais ça fera plaisir aux fans d’easy listening, la disparition de Marie Fredriksson ou autrement dit, Roxette ! Ceux qui sont nés après 1978 ne peuvent pas comprendre ;

 

-        enfin, les hommages spéciaux : à Georges Courtois, dont l’histoire est excellemment bien rappelée par Tri Yann dans sa « Gwerz Jorj Courtois », anar et bandit qui philosophait gouailleur auprès de Libé « Mieux vaut braquer au stylo Montblanc, comme Nanard [Bernard Tapie], qu’au calibre », et qui à la prison d’Angers caressait Perpète - son chat -, dessinait, lisait Baudelaire, Sartre et Nerval et passait une licence de droit en se foutant de la tronche des matons sous-diplômés, toute une époque… Nikki Lauda, Scarface de l’incendie, toujours de retour, ses duels avec Prost, et finalement champion du monde de F1 : « Lauda aide-toi, Mansell t’aidera ! », titrait l’Auto-Journal, j’étais vert mais je l’aimais bien ! Neil Innes, le 7ème Monty Python (le chef des ménestrels dans Holy Graal : Brave Sir Robin ran away. Bravely ran away away. When danger reared it's ugly head, he bravely turned his tail and fled. Yes, brave Sir Robin turned about and gallantly he chickened out. Swiftly taking to his feet, he beat a very brave retreat. Bravest of the brave, Sir Robin!

 

 

Allez, cessons-là les pleurs sur ceux qui sont partis, car il m’est impossible de résister à la vile tentation de dresser une brève liste des morts de 2019 qu’on ne regrettera pas, voire dont on se réjouit absolument que l’Être Suprême nous en ait débarrassé définitivement.

 

  • Musique Maestro, 2019 fut un grand cru ! Michel Legrand a cassé sa pipe, je ne pouvais pas le saquer, celui-là avec ses mélodies trop complexes (la grande maladie du jazz) mais surtout en raison du raffut qui fut fait, fff fff fff, aufour de sa morf, merde je confonds encore les « t » avec les « f », c’est chianf ! Mais sur France Inter, ce qui nous a sauvé du mémorial Michel Legrand non stop, ce fut la sortie du nouvel album de… Clara Luciani… Merde… Oh putain, la play-list de la grève, il n’y a qu’elle… MICHEL ! Reviennnns, tout est pardonné, je regrette, mais tu comprends, j’ai arrêté de cloper, et… et et j’ai toujours adoré Françoise Dorléac ! Qui avait une vois grave comme… Clara Luciani… Bref avant d’exploser, et c’est une dédicace à Tristan Robert et son goût musical absolument infect, réjouissons-nous, mes frères, du départ de Zdar (en vrai Philippe Cerboneschi) du groupe Cassius dont m’a toujours emmerdé la house techno funk à la con : ce mec est parti de la même façon que ses auditeurs habituels : les touristes anglais avinés des gros hôtels tunisiens dont les balcons donnent sur la piscine de la cour centrale, alors un saut mal calculé, et au revoir l’électro ! Johnny Clegg, un grand jour de deuil que celui de sa mort pour tous les fabricants de pantalons africains imprimés et super moches à part sur Tiken Jah Fakoli ! Jessye Norman pour l’horrible massacre de la Marseillaise en 1989 lors des festivités du Bicentenaire de la Révolution.

 

  • Fabien et Jean-Michel Clain (moi qui croyait les Réunionnais pacifiques et finalement assez œcuméniques…), Abou Bakr al-Baghdadi et tous ces dégénérés de salafistes, qui marmonnent leurs allégeances au gré d’humeurs changeantes (A Fleury-Mérogis, où soit dit en passant ils ont réussi à virer les Corses qui tenaient la boutique depuis des décennies, maintenant les discussions de cour de promenade sont les suivantes : « Salam aleikum, moi j’ai fait allégeance à Al Qaïda », « Aleikum salam, ah non, fils de chien ! Moi je suis Al Nosra ! », « Taisez-vous, mécréants, nous c’est Daech, et on est les proprios ici ! ») : la question du rapatriement et de vraies procédures judiciaires demeure posée ; quant à moi, je les laisserais (renverrais ?) là-bas, dans leur califat nomade.

 

 

Enfin, la catégorie des morts dont on hésite sur le fait de savoir si on les regrettera ou non. Cette année, trois nominés seulement :

 

  • Karl Lagerfeld et Jacques Chirac : tous les deux étaient des types odieux, supers menteurs, arrivistes, supérieurs, arrogants, mais devenus sympas sur le tard, enfin surtout par la grâce de leurs marionnettes aux Guignols, lesquelles ont contraint les vrais personnages à s’inspirer d’elles, dans un bouleversement complet de modèle témoignant de l’absurdité complète de notre monde ;
  • Tiens, en parlant de Nulle part ailleurs, il faut parler de la mort de Dick (Rivers), ex-chanteur des Chats sauvages, sommité d’érudition musicale mais surtout infinie source d’inspiration de Didier l’Embrouille !
  • Marie Laforêt : j’adorais son apparente folie, mais cette voix de crécelle, quand même, mais j’eusse aimé qu’elle me susurrât au creux de l’oreille que nous les referions ensembel, les vendanges de l’amour ;
  • Anémone : j’eus toujours du mal avec elle, trop grande gueule, suintant la vulgarité, mais elle était comme certains ingrédients en matière culinaire : seuls, ils sont immangeables mais ils constituent la pointe indispensable à la structure de la recette, et c’est ce qu’elle était au Splendid ;
  • Luke Perry : le beau gosse de Beverly Hills, trop beau gosse, à mon goût !

 

 

Enfin et malheureusement, l’information est confirmée : Arthur, Cyril Hanouna, Marlène Schiappa et Sibeth Ndiaye (dans un bel effort de parité et de diversité de ma part, ce que certaines mauvaises langues m’accusent de ne pas faire souvent !) ne sont pas morts en 2019.

 

 

Ni rires ni crachats.

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Voeux 2020 Fin de cycle et éternel recommencement

Publié le 8 Janvier 2020 par Luc

Un cycle se termine manifestement, où le mieux-être vient à se trouver contrebalancé par des décisions aberrantes, comme celle d’arrêter de fumer. Pourquoi cesser et ainsi se pourrir la vie quand cette dernière aurait pu s’écouler et s’achever bien plus rapidement avant que d’enfin cingler vers les rivages blancs des terres immortelles de Valinor ?

C’est sûrement qu’à l’orée d’un second demi-siècle, il nous faut un effort, une plaie, pour pouvoir continuer cette absurdité parfois douloureuse, souvent drôle à son parfait insu, mais à coup sûr transparente et sans grand intérêt.

Face à cette réalité dont nous ne pouvons nous cacher (sauf bien sûr à céder au mysticisme, à la pharmacopée habituelle des hystériques, la lithothérapie ou pis, à la bouddhisation dont est friand l’Homme moderne), nous exerçons le pouvoir de notre volonté. Mais c’est précisément et a fortiori en ces moments où plus guère d’éléments d’extranéité ne viennent parasiter nos vies ou brouiller notre humeur qu’il faut aller au devant de l’inconfort et du danger.

Aucun besoin pour ce faire de l’impitoyable jungle de Sumatra, de venimeux dragons de Komodo à l’hygiène bucco-dentaire perfectible, de terrifiants Gabonis visant comme des tanches et ratant systématiquement tout ce qui ressemble de près ou de loin à un type moustachu habillé en blanc, casqué sous un soleil de plomb et parlant anglais, ni moins encore de trekking des sables au Pérou, d’aberrants iron mans ou simplement de vacances arborées en Australie : tout cela n’est que simulacre d’inconfort, ersatz d’aventure à haute empreinte carbone, performances inutiles et au ton héroïco-vantard vraiment détestable.

Mama, was sind das, moderne Menschen ?[1]

Le vrai danger auquel exposer son corps, l’aventure ultime, la nouvelle grandeur, c’est s’offrir au réel quand la vie n’a plus d’autre sens qu’elle-même, que plus aucun espoir ne vient endeuiller, dans ce réel affolant à accepter quand même en cette année 2020.

[1] « Maman, qu’est-ce que c’est, des hommes modernes ? », la dernière réplique de l’opéra de Schönberg : Von Heute auf Morgen, Du jour au lendemain, livret de Max Blonda, publié in Ombres/Cinéma, 1997, p. 96.

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