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Hontes

Souffrances, amour, désespoir, moquerie, musique et philosophie... La vie, quoi !

cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

R57 Cannibalisme pictural

Publié le 12 Septembre 2012 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

La gravure en noir et blanc paraîtrait presque grossière, dans son format folio et comme dessinée à l’aide d’un Télécran qui eût remplacé les droites par des courbes.

 

Un homme s’y trouve, monstrueusement blessé aux jambes ; il rampe dans un paysage désertique et paradoxalement étroit, resserré autour d’un arbre bien piteux. Trois hommes debout le suivent sans précipitation, dans un ralenti saccadé. Il rampe en poussant des cris déchirants de douleur à chaque appui pris sur les bras, qui a pour effet de traîner les abats qui lui tiennent lieu de jambes.

 

Brutalement, l’un des trois hommes, coiffé d’un haut de forme et portant la moustache, se jette sur lui à une vitesse surprenante et lui arrache un morceau de chair avec les dents.

 

L’autre hurle de plus belle, de plus en plus geignard dans la souffrance.

 

Les deux autres hommes rient de bon cœur de ce qui vient de se passer, devant le rictus immonde du premier, serrant toujours le lambeau de chair entre ses dents. Ils commencent à le traîner, l’homme rampant, vers un endroit hors de la gravure où ils pourront je suppose le dévorer.

 

Alors le dessin mouvant s’immobilise dans ses courbes de mal, et les cris continuent à déchirer le siècle.

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Positif

Publié le 20 Août 2012 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

Etre positif, un soutien efficace,

Un rêve absurde…

Ton malaise est un élément absorbant,

L’image de mon désespoir.

 

Quel crâne pensais-tu frapper de ta masse ?

Cogne rude !

Je suis tendre et débordant

De mollesse, un couard.

 

Ma tête vole en éclats sur l’enclume

De ton angoisse agressive,

Et lorsque je me prive

 

De tout dans la plus sombre amertume,

Pour te soutenir sans esquive,

Cela ne change rien, je ne suis qu’une écume.

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R56 Bavure d'une police sans âge

Publié le 5 Juillet 2012 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

Après maintes aventures étranges, me voilà reparti… trop vite sûrement. Je n’ai pas bouclé ma ceinture. Après la première courbe, je constate la présence d’un barrage de gendarmerie, à la composition habituelle : un véhicule, plusieurs gendarmes. L’un d’eux se place sur la voie, en position de tirailleur, souplement appuyé sur ses jambes fléchies. Il fait signe à quelqu’un qui ne saurait être autre que moi de s’arrêter.

 

Au même instant, en pestant contre la malchance qui seule explique la présence d’un barrage alors même que je porte toujours la ceinture de sécurité, je tente de ramener ladite ceinture en bandoulière vers son point d’attache, dans le sot espoir que le gendarme n’avait pas vu que je ne l’avais pas bouclée. C’est donc d’une main que ralentissant, je me déporte vers la droite pour finalement immobiliser mon véhicule.

 

Dès avant, mon attention aurait dû être éveillée par la tenue inhabituelle de ce gendarme. Gants blancs immaculés, fourragères éclatantes à sénestre, la tenue de parade. L’homme est âgé, manifestement. Je vois ses yeux bleu fou et le cheveu très court, plus sel que poivre entre oreille et képi.

 

Je suis rangé désormais, et attends qu’il se dirige vers ma portière, qu’il me demande de baisser la vitre pour demander de fausses explications sur l’évidente violation du Code de la route, la production de mes papiers… Par la fenêtre passager, je vois passer un autre gendarme, encore plus vieux que le premier et claudiquant. Il dépasse la voiture, et je ne m’aperçois qu’alors qu’il ne boîte pas : il a des béquilles de bois. Il paraît soudain alerté. Je m’étonne de sa tenue : de gendarme, il n’a que la vareuse et porte en bas des pantalons civils de toile beige. Il sort vivement de son holster de ceinture un Lüger 9 mm. J’en regarde l’œil noir non rayé et m’étonne encore de ce type d’arme, totalement suranné et bien différent du Beretta réglementaire. Il le pointe en ma direction.

 

Il tire et mon pare-brise vole en mille-feuilles. Je ne sais si j’ai été touché. Je ne parviens pas à me libérer de l’étreinte de ma ceinture pour me protéger sous le tableau de bord. C’est la panique du monde. Je ferme les yeux, fais ou suis le mort, une vive douleur à la poitrine, sans savoir si j’ai été frappé d’une balle.

 

J’entends un deuxième coup de feu, et le néant s’empare de moi dans la terreur. Je perçois toutefois la conversation étouffée de gendarmes selon qui l’arme aurait explosé à la tête de son détenteur lors du troisième coup de feu. Et maintenant encore, j’ignore si je suis mort ou non.

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R54 Eclipse varoise

Publié le 27 Juin 2012 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

La sonnerie du portable retentit. Mon père m’appelle et me donne rendez-vous pour déjeuner dans un petit restaurant dans le Var. Me trouvant justement à l’est de ce département pour une raison que j’ignore, j’accepte volontiers l’invitation et m’enquiers de l’itinéraire. Il me répond avec sa gouaille habituelle que ce n’est pas compliqué : il suffit de suivre la côte et de rouler une heure à partir de l’endroit où je me situe, qu’il connaît par ailleurs fort bien. Je me mets en route.

Au bout de cinquante-cinq minutes, alors que la nuit est déjà tombée, je vois sur ma gauche un restaurant perché à flanc de falaise blanche, décoré de multiples guirlandes lumineuses, et surtout, sur ma droite, un vaste parking quasiment vide. Dans la mesure où il n’est sensé rester que cinq minutes à rouler, je décide de garer la voiture et de terminer en courant, au cas où le restaurant où nous avons rendez-vous ne serait pas équipé de parking.

 

Je cours sur la petite route baignée d’un agréable soleil de fin d’après-midi, sans aucune fatigue ni transpiration, comme si mon mouvement participait d’une éternité présente. L’éternité ne s’exprime pas en durée, puisque justement elle est l’absence de temps. C’est donc instantanément que, courant depuis une heure, je parviens à un petit village méridional. Arrivé en son centre, je constate l’absence de restaurant, mais remarque la présence de trois hommes devisant joyeusement. Je me rapproche d’eux et leur demande où se trouve ce fameux restaurant. Il est dix-sept heures. L’un des hommes voit très bien de quoi je parle, mais m’affirme qu’à pied, même en courant, je n’y serai pas avant une bonne heure et demie.

 

Me voilà dans le désarroi le plus profond : que dois-je faire ? Continuer à courir sans lassitude vers mon but, mon père, la boisson et la nourriture, ou au contraire rebrousser chemin, courir en sens inverse durant une heure, et rejoindre la nuit, mon véhicule et la sécurité ? Je m’assieds et ferme les yeux. Derrière ceux-ci s’imprime le plan du sud Var en vert, la mer en bleu, et des traits rouges se dessinent seuls pour simuler les différentes possibilités. Le meilleur trait plein n’est pas celui de la côte, chemin que l’on m’a assigné mais qui paraît bien trop long. Il n’est pas plus celui qui en pointillé m’indique la voie du retour nocturne. Non, le seul sentier valable est celui qui franchit la mer de crique en calanque jusqu’au restaurant final. C’est donc assis sur la place désormais déserte d’un village empli de soleil en pleine nuit de midi que je prendrai mon envol.

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Cercle noir

Publié le 21 Juillet 2008 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

Cette fois, tu as été trop loin… Un affreux lieu commun pour signifier ma rage teintée de désespérance. Pour dix fois où je m’humilie par lâcheté, je ne compte qu’une seule et pâle excuse de ta part. Peut-être supportes-tu mieux le conflit que moi, faible esprit amoureux, du calme et de la régularité avant tout, il est vrai.

Sitôt que tu abandonnes ton piédestal de bien-être, du haut duquel tu consens parfois à effacer la gravité agressive de tes traits, puis à me consentir un mouvement de tendresse, d’amour voire, tout empire si vite. Le ciel s’assombrit à une vitesse incroyable, les nuages épais et visqueux de la colère s’amoncellent au-dessus de ma tête pesante et déjà meurtrie, pour finalement, c’est-à-dire immédiatement, la foudroyer.

La rémission de mes péchés est conditionnée à mon humiliation, à l’abaissant aveu de mes fautes devant ton inquisition angoissée. Ton propre péché n’existe pas alors, jamais. Selon ton ire, tu ne saurais être qu’innocente, vierge de toute souillure et de tout tort, même bénin, même fugace.

La maladie ou le malaise passager n’est pas une excuse à l’agression.

Tu m’agresses.

Tu me lies au poteau enflammé de tes cris de colère.

Tu me prives de tout mouvement, de toute envie de passer à autre chose, de penser.

Ton cercle noir est parfait autour de moi.

Seuls les éclats de ma cervelle alors délivrée de ton aporie le franchiront.

C’est très bien.

C’est sûr.

C’est mort.

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Rêve 62 Apocalypse érotique

Publié le 16 Juillet 2008 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

La journée avait plutôt bien commencé, dans un bain à bouillons, un sourire éclatant, la transparence érotique de l’eau sur l’intimité parfaite, que je caressai dans la déformation des remous, mais tout cela devait cesser…

 

Les budgets de la Défense nationale doivent être réduits. Tous les spécialistes et parlementaires présents à la réunion plénière attendent avec une impatience mâtinée de crainte la teneur des décisions du gouvernement, dont le porte-parole, un feuillet simple à la main, arrive au pupitre.

 

D’une voix posée mais forte pour s’imposer au brouhaha de l’assemblée, il dit :

 

-          Vous connaissez tous l’état de nos finances. C’est pourquoi nous avons décidé, en application de l’article 4 de notre Déclaration constitutionnelle, que nos armées ne seront dès demain plus composées que des cinq cavaliers de défense prévus par les textes.

 

Le tollé est énorme, les protestations fusent de toutes parts, dans une opposition générale à la mesure de l’anéantissement de toute défense militaire.

 

A quoi ressemblent ces cinq cavaliers ?

 

M’y voici. Sur une vaste étendue désertique de terre brune, devant un soleil couchant ou un incendie d’apocalypse, la nouvelle force est là : un arbre métallique peu élevé mais aux cinq frondaisons circulaires en plateformes nettement perceptibles, très éloignées du tronc auquel elles ne sont reliées que par une branche unique d’acier. Sur chacune d’entre elles, une quinzaine de maoris en uniforme américain, classe 1944, procèdent à un haka rituel mais silencieux. Sur l’aire centrale de l’arbre, quelques mélanésiens retenant leur souffle, joues et torses gonflés de manière ridicule, s’échinent à reproduire la scène du drapeau d’Iwo-Jima, sans succès semble-t-il. Un guerrier s’empare du drapeau enroulé autour de son axe, avec une puissance bien réelle, mais se heurte à la difficulté de dénouer les nœuds enserrant l’oriflamme. Les gros doigts sans précision de sa main gauche ne parviennent pas à saisir les fins fils de coton, tandis que sa main droite soutenant seule le poids commence à trembler, faiblir… Le mât s’incline peu à peu, tandis qu’un autre maori retient toujours sa respiration en sautillant sur place, les joues comme deux ballons. Ca y est, le mât touche une poutre de bois bleue, la démonstration est une catastrophe.

 

Très vite, sur ce grand chalutier de haute mer, je réalise que la poutre est vermoulue, et en fais part à l’équipage, alarmé par le danger de ce nouvel étendard pesant sur le désormais précaire édifice. Le capitaine intervient en personne et paraît peu satisfait de mon insinuation. « Vermoulu, mon bateau !? », fait-il en colère. Il décide de me prouver le contraire, et me demande de m’asseoir en m’accrochant au bastingage bâbord avant. Il retourne à la cabine de pilotage et mets les machines en avant toute en calant la barre à tribord toute. L’accélération est insoupçonnée et la force centrifuge me cloue contre le bastingage de bois surmonté d’un garde-fou métallique. Je sens le bois ployer sous mon poids. Je vais me retrouver à la bâille, mais le bateau ralentit et en voulant me lever, le bastingage se soulève et me reste entre les mains. Je le replace discrètement, habile dans ce jeu de reconstruction. Ce navire est pourri jusqu’à la moelle.

Je décide de le quitter en passant par la poupe. Le pont arrière est empli d’eau et l’on y circule qu’en marchant difficilement sur trois flotteurs de vieilles Moana grossièrement reliés par des sangles noires. L’équilibre est précaire et c’est soulagé que je rejoins la terre ferme, femme et enfant.

 

Nous devons assister dans l’amphithéâtre Portalis à une rétrospective sur les Beatles. Sur les longs pupitres semi-circulaires du lieu sont disposées des nappes et des couverts argentés, des verres de cristal et des serviettes saumon. Il n’entre nullement dans nos intentions de manger, aussi nous mettons-nous en devoir de trouver des places de bar simple. Ci-fait, Hervé est là, qui a réservé quelques places idoines sur un côté de l’amphithéâtre, nous permettant de surcroît de nous échapper discrètement par les coursives en cas d’ennui trop prononcé. L’allure de l’animateur silencieux ne prête guère au doute : la conférence sera d’un ennui mortel, ainsi qu’en atteste son long visage maigre, sa chevelure épaisse, bouclée et désordonnée, sa cravate rose de George Harrison des eighties.

 

Je me glisse en dehors de l’endroit, en rampant à moitié et me retrouve dans une petite allée couverte, par où la lumière ne pénètre que par la gauche, en passant sous des arcades de pierre beige, formant une ambiance orientale assez surprenante au sortir du majestueux amphithéâtre de bois.

 

Femme et enfant sont sortis par une autre issue, et je les ai perdus de vue. Marchant paisiblement dans l’activité profuse d’un souk sans boutiques, agréablement ombré quand le soleil derrière les arcades paraît impitoyable, j’entre dans une chambre de pierre, basse de plafond, où se trouve une certaine Sandrine, que je ne connais pas, dont le visage ne ressemble à aucun de celui des Sandrine que j’ai pu connaître auparavant. Ses bras entourent mon cou et nous sommes nus, nous asseyons face à face en tailleur, puis nous allongeons en sens contraire. Au loin de mes jambes à la longueur disproportionnée, en haut de ses jambes à la longueur disproportionnée, je vois l’origine lisse de son monde, surmontée d’une végétation rase, une petite colline ourlée , un vallon, puis deux collines plus prononcées, avant son menton qui s’agite. Elle me parle donc et je n’entends pas, ni sa douceur, ni d’éventuels mots d’amour. Je ne reçois pas qu’elle me dit qu’elle attendait cela depuis si longtemps, sans que je puisse saisir s’il s’agissait de moi ou d’une tendresse passagère. Je préfère m’endormir dans la lumière brune qui joue avec la poussière entre deux sourires d’un bonheur fugace.

 

Je me réveille rapidement, seul, et me remets en recherche, dans les mêmes ruelles couvertes. Soudain, je constate sur le sol de terre battue la présence du sac de ma femme, béant. Une petite boîte métallique ouverte attire mon attention, dans laquelle je vois deux ou trois boulettes de résine de cannabis. Avouer ma surprise serait peu dire, et j’en reste là, à mes aporétiques constats, quand une porte dérobée s’ouvre sur ma droite et apparaît le visage de mon épouse aimée, fatigué, cerné, les yeux entourés de khôl. Elle m’explique avec désinvolture amoureuse qu’elle était avec des copines, qu’elles ont bien fait la fête et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter.

 

Me voici rassuré, tandis qu’un brasier enflamme le ciel derrière les arcades.

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Nebaon... (1)

Publié le 15 Juillet 2008 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

Dans les hurlements je n’ai pu que fuir. Ce qui se passa devait se passer, je l’avais toujours su, comme je pressens toujours ce qui adviendra de déplaisant, en Cassandre vieillissante. J’ai alors marché dans un semblant de calme sur la terrasse, en direction de la forêt toute proche, encore quelques pas pour m’éloigner du tumulte, mais pas trop loin, pour l’entendre encore et me convaincre de la fatalité vaticinée.

 

J’ai croisé mes bras en fixant les arbres secs, contrairement à mes yeux qui s’humectaient peu à peu. Le poids insensé de ma fonction m’écrasait comme un insecte. Ne l’avais-je pas dit que ce serait un carnage ? N’avais-je pas prévu l’ampleur du désastre ? Je suis donc demeuré, interdit, de bonheur tardif.

 

J’ai vacillé de toute ma lourdeur, la fuite vers la fatigue et le sommeil comme cautère, mais l’agitation bruyante alentours m’a coupé de ma retraite, invité en son sein désordonné, étripé de vacarme confus, dépecé de sons atroces de joie sans problème, de minimisation du chaos insupportable, du meurtre de la douleur sur l’autel du bien-être.

 

Je n’ai pu fuir donc, mais les hurlements ont finalement cessé, contrairement à mes yeux de se piquer, quelques minutes encore, quelques verres de plus, encore. Cassandre disparaît de mon champ de vision qui se rétrécit à l’unisson. Je touche au soleil de nuit, à la joie partagée. Je m’étrangle en ne rêvant que de me pendre. Je suis heureux. Ma gorge se serre. Tout va bien. Je ne l’avais guère envisagé comme possible. C’est une bonne soirée.

(1) Sois sans crainte...

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Piège

Publié le 1 Juillet 2008 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

L’amour te va si bien

Quand il te donne tout,

Cette monstrueuse

Beauté de tubéreuse.

Qu’on me torde le cou !

Je cède à ce parfum…

Assise, tu me regardes

De yeux bruns et brillants,

Mutins et pétillants,

Et sans y prendre garde,

Je te contemple ému,

Pour mieux te rêver nue.

 

Puis dans un mouvement

Alangui de ta peau,

Félin étirement

Dessinant un anneau,

Tes mains viennent se joindre

Sur ton cou, je vois poindre

La magnificence

D’aisselles à l’essence

Parfaite, orbes courbées,

Lisses et brunes, venant

Rejoindre en l’étreignant

Ta poitrine galbée.

 

Je demeure sans vie

Face à tes confidences

Qui confirment le lit

Dur de mes impudences.

Et je sais maintenant,

Par une vile ruse,

Diversion qui t’abuse,

Que ta statuaire est marbre,

Que ton corps est tout glabre.

Tu t’es livrée sans peur,

A mon plus grand bonheur.

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Rêve 61 Noyade vers le Vercors

Publié le 30 Juin 2008 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

Tout a commencé par des cris de joie, entrecoupés de rires, alors que des clapots égayaient encore l’atmosphère derrière la porte de cette salle de bains. Je la pousse prestement et constate la présence d’Arthur, le fils d’Hervé, étrangement juché sur une chaise haute en forme d’échafaudage, la construction étant disposée au-dessus des toilettes. Ses rires continuent à mesure qu’il provoque avec ses pieds des remous dans l’eau souillée du cabinet. Ses bruits m’ont empêché d’entendre ceux d’Erwann, prenant son bain dans la baignoire voisine, vers laquelle, soudainement assailli par une angoisse oppressante, je me précipite. J’y vois rapidement le corps de mon fils, flottant immobile à plat-ventre.

Je me jette sur lui et l’extirpe de l’eau. Il n’a aucune réaction alors même que je suis persuadé de l’avoir senti prendre sa respiration… Mais non, il doit être bien noyé et ma mortification commence.

 

Il lui faut donc courir, à ce vieil homme, pour échapper à sa terrible condamnation. C’est sur son lieu de travail, un grand et magnifique immeuble dix-neuvième contribuant à former l’enceinte d’une place arborée avec d’autres monuments de même nature, que je vois entrer l’homme vêtu d’un chapeau mou, de lunettes de soleil et d’un imperméable noir qu’on aurait cru découpé dans du papier cartonné, tellement ses arêtes et angles paraissent exagérés. Il a dans la main droite un trente-huit spécial à silencieux. A travers les larges fenêtres, je le vois abattre un premier homme derrière son bureau, puis s’approcher du cadavre afin d’en vérifier l’identité.

Le vieil homme profite de ce court moment d’inattention du tueur de papier pour bondir de dessous son bureau jusqu’à la fenêtre proche, l’enjamber lestement et courir à bonne allure vers le parc central de la place. Le tueur s’en aperçoit sans tarder et vise la cible mouvante, qui s’écroule sans un cri.

J’ai néanmoins remarqué que le vieil homme avait chu avant que ne me parvienne à mes oreilles le pop caractéristique du pistolet à silencieux. Est-il rusé, ce vieillard ! Il s’est laissé tomber pour s’offrir un peu de temps. D’ailleurs, sitôt le tueur disparu par le couloir de la pièce d’où il avait tiré, l’homme se relève et reprend sa course, laquelle s’infléchit vers moi. Il approche. Plus près. Plus près encore. Il me passe à travers, et c’est moi qui me retrouve à courir pour éviter que le tueur me rattrape.

Je ne prends qu’alors conscience que je suis à Montpellier et que le but de ma fuite est le Vercors. Je cours à une vitesse démesurée dans un Montpellier qui s’offre désormais à moi industriel et gris, étant sorti de la place par une petite rue pentue.

 

Que me sert-il de courir ainsi sans but ? Je décide de demander ma route à un passant, qui s’arrête gentiment mais me demande plus d’explication sur mon but précis. Il est vrai que le Vercors… Je me saisis de mon téléphone mobile, pour constater que je n’ai plus qu’une barre de batterie, la réception réseau étant à peu près au même niveau. Je n’aurai donc droit qu’à un essai. Je me résous donc à appeler Olivier, qui se déclare heureux de m’entendre, et commence par me dicter un itinéraire hallucinant à partir de Montpellier : Saint Dié, puis Ozier, puis la départementale numéro je ne sais plus quoi. Je répète à haute voix ce début de trajet et me retourne vers l’endroit qu’aurait dû occuper le passant. Celui-ci à dû s’impatienter puisqu’il a disparu et que je me retrouve dans le flux de sortie d’une synagogue. Le ballet des kipas n’arrange rien à mes affaires. A ce qu’un homme me dit, je réponds :

 

-          Ouais ouais, c’est ça, shalom aussi…

 

Je décide donc de reprendre ma course en suivant les panneaux signalisant les autoroutes. Jamais je n’ai couru ainsi, sans essoufflement, presque un vol. Les nœuds routiers se multiplient et les panneaux indicateurs vieillissent sans mesure, leur peinture racornie et écaillée demeurant à la limite du lisible. Avant qu’il ne s’efface complètement, j’ai le temps de découvrir le message de l’un d’eux : Nîmes – Lyon. Le Vercors donc. Je m’engouffre dans la bretelle et me mets à agiter stupidement le pouce droit de bas en haut.

 

Rapidement une voiture s’arrête. Je suis donc sauvé. Loin le tueur cartonné, digéré le vieillard parasite qui s’était immiscé en moi, mais toujours là, la mort de mon fils. Je m’apprête à prendre place à l’arrière, peu exigeant sur les destinations et le nombre de kilomètres possiblement parcourus, et constate rapidement que cette voiture était en vérité un autobus de bonne taille. Un autre auto-stoppeur en profite pour monter également. La conductrice de car est blonde et pour être tout sauf grosse, n’en possède pas moins une solide armature. Est-elle allemande ou autrichienne ? En s’étirant assise sur une banquette d’un air très satisfait, elle dit :

 

-          Alors comme ça, j’en ai deux pour moi…

 

Tandis que l’autre homme et moi étions assis côte à côte, elle vient s’allonger sur nos cuisses, en fermant les yeux et prenant une posture ensommeillée, sa tête sur ses bras sur les jambes de l’autre homme, le bas de son buste et ses jambes sur moi. En cherchant sa position, sa courte robe vieux rose est remontée jusqu’à son nombril, me dévoilant son pubis clair, ne comptant plus que quelques poils noirs et drus taillés en forme de minuscule soleil. Je décide de prendre aussi un peu de repos et pose ma joue sur ce pubis avant de fermer les yeux. J’entends une voix de petite fille approuvée par sa grand-mère :

 

-          Il pique !

-          Et oui ma petite…

 

J’ignore à qui s’adressait cette remarque de la petite fille, mais comme à mon habitude, je la prends pour moi, pas bien rasé ce jour-là il est vrai. Sentant sur ma joue les velléités de repousse des poils pubiens de notre Allemande endormie, je me dis que je ne suis pas nécessairement le seul. Je rouvre un œil pour me goberger du spectacle calme et magnifique qui m’est offert : ses lèvres sont exemptes de tout poil, merveilleusement lisses et d’une douceur incomparable, que mon doigt effleure et confirme. Ma joue brûle devant un Montpellier industriel en flammes, en route vers la seule destination valant encore, celle d’Erwann vivant.

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Découverte

Publié le 11 Juin 2008 par Luc dans Cercle noir (du 26-2 au 17-7-08)

Quelque chose me gêne désormais, que ma culpabilité et son avatar naturel, l’indulgence pour l’autre confinant à la pusillanimité, m’empêchaient de vivre pleinement. La question s’avère fine : qu’a-t-elle fait pour moi ?

 

Je m’emmêle souvent les pinceaux dans la toile que je souhaite peindre, sinon d’un monde, du moins d’une vie sans conflits, ni heurts ni passions désagréables au sens où l’entendait le Maître du Jardin. Lorsque je ne m’excuse pas car convaincu de mon bon droit, je rampe avec humilité pour faire cesser le feu meurtrier. Je me contrains à ce damné aller-vers que j’abhorre, je me livre à mille tâches exécrées, à la détestable habitude des petits cadeaux, le tout pour faire retomber la colère. Je me fais donc violence dans la tristesse, deux humeurs négatives à fuir absolument.

 

En contrepartie de quoi… rien. Lorsque la colère la prend, la faute ne saurait peser que sur moi, même si les faits qui causèrent le dysfonctionnement ne me sont aucunement imputables, même si prétendre le contraire relève de la pure fantaisie. Il n’existe plus dans ces cas de figure de velléité d’objectivité, de mode probatoire, de conscience ni de simple raison : la faute postulée justifie le blâme qui m’est adressé, qui lui-même ne peut qu’entraîner ma pitoyable et immédiate demande de pardon, sauf à encourir les foudres de la colère et du mutisme le plus hostile.

Je ne saisis plus la justification de cet impératif catégorique que constituerait ma faute originelle, tellement chrétienne et qui entraîne, évidemment, la haine de soi et de son corps.

Je la comprends d’autant moins que je constate que la réciproque n’est que peu vraie : jamais un acte de contrition en cas de tort, jamais d’excuses en cas d’emportement excessif, jamais un pas vers moi-même lorsque la colère s’est atténuée.

 

Cela dit, je ne me révolte pas. Si ma raison me souffle de fuir ce qui me nuit, mon cœur s’empresse d’acquiescer à toutes les actions d’expiation du quotidien. C’est probablement parce que je n’ai jamais été amoureux de la vie mais d’une autresse qu’endolori, j’en supporte les conséquences de manière aussi bonhomme. Il n’y a même pas de hiatus tant les choses de la raison et celles du cœur sont éloignées et étrangères les unes des autres. Il ne sert à rien de se battre, la fierté et l’orgueil n’étant que de biens beaux concepts sans existence réelle autre que la bêtise.

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