5 novembre 2003
Alors que les premiers rayons du soleil venaient s’étouffer dans le brouillard de la plaine, juste en dessous des crêtes déchirant le ciel clair, j’avançais sans but. Tant de souvenirs remontaient concomitamment à la surface, une engelure, des gerçures, le déplaisir de manger dans la souffrance… Alors je fermai les yeux face au soleil rouge qui continuait de monter ses formes rebondies au-dessus des limbes.
Derrière les paupières se dessinèrent tout de suite trois soleils si proches dans le noir total, se mouvant dans un demi-cercle ondulatoire. De cet ensemble se dégageaient des formes fantastiques. Des monstres sauvages, des visages enflammés engageaient leur danse silencieuse tandis que mon corps se rappelait bruyamment à ma conscience assoupie, dans la gêne plus que la douleur.
Je rouvris périodiquement me sabords fantasmagoriques pour observer la rondeur luminescente commençant de devenir jaune au-dessus de la pâleur de l’horizon. Détournant la tête, les marécages demeuraient soumis au brouillard en nappes, puis les prés à la brume lourde et humide. L’ombre recouvrait cette part de mon champ cependant que la chaleur en envahissait l’autre côté, léché par les dards du soleil, dont je finissais par me demander s’il était vraiment aussi amical que cela.
Dans l’attente et le doute, sa lumière jouait avec mes cils et tous donnaient au monde des teintes blondes et rousses. Les mouvements rapidement alternés avec la pénombre donnaient la sensation d’un stroboscope tranquille, dont l’épilepsie n’eût jamais pu résulter. Alors la mélancolie, le vin noir dont mon corps tentait de me prévenir dès avant le début du parcours, débutèrent leur lente escalade de mes organes grognards.
Le ventre tout d’abord se serra alors que le brouillard et une froidure inattendue prenaient plus d’ampleur dans leur glaciale morsure. L’estomac gémit et se para de tous ses attributs contestataires. Le corps ouvert de hernies et les yeux continuant leur folle ronde entre tunnel et soleil désormais haut, j’achève presque ma course immobile.
Quand cela finira-t-il ?